Discours de la Coupo 2020

Discours de la Coupo

Discours de la Coupo 2020 dóu Capoulié dóu Felibrige Jaque Mouttet, proumiero partido :

Discours de la Coupo 2020 dóu Capoulié dóu Felibrige Jaque Mouttet, segoundo partido :

Discours de la Coupe

en visio

Dimanche 22 novembre 2020

Galante Reine,

Chers Félibres,

Nous vivons dans l’angoisse depuis le mois de mars. La période douloureuse du premier confinement qui se prolongea que trop, meurtrit les cœurs et marqua de tristesse la tragique situation sanitaire vécue. Une situation difficile qui dure toujours, qui nous tourmente et qui empêche une nouvelle fois la tenue de nos réunions statutaires prévues à Fourques et la sociabilité de notre vie quotidienne telle qu’elle devrait être.

Nous avons su, nous, félibres, nous rapprocher, partager, s’aider, se donner des nouvelles ; nous avons essayé de ne pas dénouer les liens qui nous unissent, ne serait-ce que grâce à la revue Lou Felibrige et au site Internet. Nous avons tenu et nous tenons coûte que coûte le cap malgré les nombreuses raisons que nous poussaient et nous poussent toujours aujourd’hui à la séparation.

Chers félibres, à l’heure où nous aurions dû avoir le bonheur de se rassembler enfin autour de la Coupe, nos pensées vont vers ceux qui ont souffert et qui souffrent toujours de cette contagion : les victimes, les malades, le corps médical et tous ceux qui, sans faillir, ont permis et permettent à la vie de continuer. Plus intimement, nos pensées iront vers les félibres qui ont été contaminé par le mauvais virus et qui en ont enduré les ravages ; nous leur assurons notre compassion.

À défaut de Santo-Estello 2020 et désormais des réunions de Fourques et du Banquet de la Coupe qui devait s’y tenir grâce à la bienveillance de Monsieur le maire Gilles Dumas, nous diffusons le discours de la Coupe par le flux de l’Internet. Les félibres connaissent, Monsieur le maire de Fourques, votre attachement à notre Cause et aux valeurs du Félibrige, ils savent le travail que vous accomplissez pour notre langue et notre culture. Cette occasion nous aurait permis de vous apporter la Coupe, un acte qui personnellement me réjouissait tant je sais que vous en mesurez le poids et le symbole.

Merci Monsieur le maire, merci à votre conseil municipal, merci aux félibres de Fourques et à l’Escolo d’Argènço qui avaient tout mis en œuvre pour nous accueillir bellement et qui nous avaient apporté une aide précieuse.

Chers félibres, je ne prononcerai pas le discours que j’avais prévu pour Mende, vous comprendrez que je préfère suivre l’actualité liée à la crise. Il ne s’agit pas d’en commenter les différents aspects et toutes les conséquences, nous sortirions de la sphère de notre Félibrige. Mais vous vous êtes certainement rendus compte comme moi, qu’à la sortie du confinement du printemps, plusieurs sujets mistraliens furent mis sur la table :  la place, le rôle des régions ; le retour vers les campagnes, la relocalisation, la décentralisation.

Tout à coup, se sont trouvés mille mérites, avantages et bienfaits à la philosophie mistralienne, et soudain réapparaissait, pleine de sens, la vieille revendication des années soixante-dix « vivre au pays ». Les affirmations que nous avons vu émerger d’ici et de là, sans que ne le sachent vraiment leur auteur, font référence à ce que depuis toujours réclame le Félibrige, dont la doctrine se trouve dans les œuvres de Frédéric Mistral et de ses disciples.

Maintenant que nous constatons, pour toutes sortes de raisons, une claire volonté de fuir la ville, Frédéric Mistral, dès 1880 dans son discours « La despoupulacioun di campagno », prévenait :

 « Ah ! si on savait le mal que l’on fait à la patrie, en arrachant au peuple, à l’homme de la terre, le lien qui l’attache à sa vieille famille, à ses bonnes coutumes, au pays où il est né ! ».

« La population s’en va, la jeunesse descend vers la pourriture des villes ».

Mistral ne voulait pas voir la population abandonner les campagnes pour s’installer dans les villes. Il savait que cet exode était à contre-sens des valeurs qu’il répandait. La réalité d’aujourd’hui prouve qu’il avait raison. Le mécanisme est sur le point de s’inverser. Après avoir profité de toutes les facilités, de la surconsommation et de l’insouciance, le monde s’avise que finalement il existe une autre manière de vivre, peut-être avec un peu moins d’aisance et un peu plus de contraintes, mais, de combien, plus saine et sereine.

Il y a ensuite la relocalisation qui fait écho à l’esprit mistralien et à ce qu’en pensait en 1960 Charles Chabanis « Si l’on perd la Terre, l’on perd le Ciel, l’on y gagne que des berlues. Mistral refuse le travail sans âme, refus de ce monde de technique où ne respire plus l’esprit. Avec la perte de l’âme, arrive le manque de confiance dans la vie et le mépris du travail. » et, « Mistral est contre l’abêtissement que le progrès apporte aux hommes, contre cette civilisation de plus en plus mécanique qui ressemble à une tyrannie, contre le pouvoir fabuleux des choses sans âme ».

Claire référence à notre doctrine, toujours, lorsque nos décideurs s’avisent des bienfaits de la régionalisation. Souvenons-nous quand Frédéric Mistral se révoltait en 1875 à Montpellier :

« D’où vient ce discrédit… Vient-il de l’oppression, chaque jour plus grandissante, du centre parisien ? Vient-il de la manie propre à notre siècle de vouloir tout aplanir, et de vouloir que tous marchent de la même façon, pensent de la même façon, parlent de la même façon ? ».

Puis en 1882, il questionnait : « Ne devons-nous pas nous garantir contre l’abus de l’unité, contre cette puissance terrible, excessive, la centralisation, qui vient nous empoisonner, jusqu’au dernier village des Pyrénées e des Cévènes, non seulement ses modes et son uniformité, mais encore ses folies, sa raillerie, sa misère, cette décentralisation qui veut se mêler de tout ».

Vînt alors, cent ans plus tard, l’heure de la décentralisation. Le Félibrige toujours attentif à son élaboration votait lors de la Santo-Estello de Saint-Sever en 1981 le vœu que voici : « Le Conseil général du Félibrige prend acte des intentions manifestées par le Gouvernement de la République, en faveur d’une véritable régionalisation, chaque région devant retrouver son identité géographique, linguistique et historique à côté des nécessités économiques et sociales contingentes. Il se félicite de voir accueillies les idées que le Félibrige a mises en avant et défendues sans relâche depuis 1854. »

 L’année d’après, le ministre de la Décentralisation avait annoncé : « La décentralisation ne sera effective et vraisemblablement entrée dans les mœurs que quand elle sera à la fois une décentralisation culturelle et une décentralisation économique, c’est-à-dire quand les artistes n’auront  plus besoin d’aller à Paris pour être consacrés sur le plan national ou international, et quand les chefs d’entreprises n’auront plus besoin de se rendre dans la capitale pour régler leur dossier : alors vraiment la France sera un pays décentralisé ».

Des paroles aux actes, le chemin est tortueux. Il aura fallu attendre encore quasiment quarante ans, au mois de juillet dernier, pour entendre des paroles similaires et surtout pour apprendre, de la bouche même du président des régions de France, l’A.R.F., qu’ils ne parlent pas seulement, les présidents des régions, de décentralisation, mais également de fédéralisme et parfois d’autonomie !

Encore des paroles me direz-vous. Oui ! Mais cela prouve qu’il y a au moins une réflexion sur le sujet et, plus que tout, que l’idée du Maître tournoie toujours.

Il est quasiment incroyable d’entendre un tel vocabulaire dans la bouche d’un homme politique français en 2020 ! J’en fus le premier ébahi, néanmoins il suit pour le mieux le droit chemin de la parole mistralienne. Dans « L’estacamen au terraire », Mistral sans retenue emploie six fois le mots indépendance. Dans le mot indépendance tel que l’emploie le Maître, il faut y voir justement ce que demandent aujourd’hui les présidents de régions : l’indépendance d’esprit, de pensée, de liberté et d’action.

 Voici donc chers félibres, les effets perçus tout au long de ces derniers mois. Des effets qui pourraient enfin répondre aux griefs exprimés par Frédéric Mistral lorsqu’il disait dans « li prejujat poupulàri » : « Dans les villes plus changeantes, où plus que jamais l’esprit de nouveauté mène et corrompt le peuple, c’est presque un déshonneur de garder les coutumes, les traditions, la langue de nos devanciers ; de telle sorte que partout, au théâtre, au palais, à l’église, on fait à notre langue une guerre inconsciente, mais pourtant quotidienne, et à la fin mortelle ». Ou encore dans « La lengo dóu Miejour » : « Si ceux qui nous entendent sont des gens bien nés, des personnes d’esprit ou simplement de braves gens, ils approuveront de cœur notre gai et franc parler ; si au contraire se sont des niais, notre exemple leur apprendra à revenir au naturel ».

 « Mistral donne la réponse à ce que l’homme recherche, à ce qui sans cesse le hante : il a dépassé les frontières de sa patrie, il est de toutes les patries », écrivait André Chamson[1]. Nous n’avons rien inventé, nous continuons de proclamer ces quatre vérités dans le droit chemin de ce que le Maître écrivait à Jules Boissières : « Ma conviction, partagée déjà par quelques hommes de pensée, est que le Félibrige porte en lui la solution des grandes questions politiques et sociales qui agitent l’humanité ».

Mais, chers félibres, gardons-nous néanmoins, comme prévient encore Frédéric Mistral, de nous mêler de politique politicienne. Il s’agit de se remémorer ces vers dans « Li Noço de Ranquet » : « Dans la politique, – Taverne despotique, – Il n’y a que fripons – E que gourmades ! [1]». Tout juste au contraire de la politique politicienne et de la politique de partis, ce qui nous intéresse est la politique au sens noble et plein du terme, car nous n’avons qu’une politique, la nôtre, comme le rappelait volontiers le regretté majoral Michel Tintou. Cette politique contenue dans l’œuvre et les discours de Frédéric Mistral, Mistral qui au-delà de la défense de la langue et du « signe de famille » souhaitait établir patiemment la paix du monde sur la fondation fédérative, principalement d’une fédération latine qui, loin de vouloir effacer les personnalités ethniques aurait conserver toute l’autonomie qui advient naturellement avec les exigences du lien fédéral.

Bien que le fédéralisme ait été le rêve en d’autres temps, les paroles de Frédéric Mistral, elles, indiquent toujours notre direction. Abreuvons-nous encore de ces citations mistraliennes qui font notre force, qui nous donnent de l’énergie, qui expliquent notre engagement et qui commandent notre conduite :

– Dans « La langue du Midi » : « Et quand le peuple comprendra le sens patriotique et la grandeur du Félibrige… »

– Dans « l’Attachement au terroir » : « vous comprenez à présent la profondeur, la force de l’idée félibréenne »

– Dans « Le Félibrige et l’empire du soleil » : « …que la France en tire gloire, que la France n’en grandit que plus »

– Dans « Les préjugés populaires » : « bravant les dédains de la moderne suffisance » une phrase toujours d’actualité.

À la lumière du message universel de Frédéric Mistral, nous voulons croire qu’un jour enfin, le Félibrige inspirera gouvernement et société.

Voici chers félibres, à l’image de l’actualité, ce que je voulais vous dire aujourd’hui en apportant la preuve que Mistral toujours rassemble et éclaire. Et après ces mots, pour bien comprendre notre Félibrige, il faut savoir le regarder, il faut savoir l’apprécier, il faut l’admirer et l’entretenir comme un monument patrimonial, mais également comme le flambeau de notre Renaissance et de nos espérances.

Le Félibrige, chers Félibres, donne le bonheur de connaître et d’aimer une histoire et un héritage, de vivre un présent raisonné et de, pourvu d’idéal, de se projeter vers l’avenir. Le Félibrige offre certaines clefs pour le bien-être et la tranquillité de la société. Le Félibrige enrichit la vie.

La jeune génération de nos contrées aura de s’imprégner largement de la philosophie mistralienne pour adhérer à cette haute réalité sémantique.

Dieu merci, toutes les générations de félibres ont su prévoir les lendemains, elles ont su générer des vocations qui intégrèrent la richesse félibréenne, qui l’ont protégée et servie.
Alors que se dessine petit à petit la fin de mon capouliérat, vous n’imaginez pas la joie qui me gagne de voir se discerner les vocations qui feront le Félibrige de demain.

Alors, je boirai à l’ardeur et à l’engagement.

Je boirai au maire de Fourques, Monsieur Gilles Dumas, qui incarne ces valeurs.

Je boirai à notre Reine Adeline et à son enfant Gaëthan.

Je boirai au nouveau baile du Félibrige, le majoral Paulin Reynard.

Seul devant ma Sainte-Victoire, en pensée avec chacun d’entre vous, je boirai à vous tous, chers félibres, qui avez l’avenir du Félibrige entre vos mains.

Dans l’attente d’être l’année prochaine à Mende, réunis dans la communion de la Coupe, je vous adresse, chers félibres, mon salut le plus fraternel.

 

 

Jacques Mouttet

Capoulié du Felibrige

en visiò
Dimenche 22 de nouvèmbre 2020

Gènto Rèino,
Car Felibre,

Sian dins l’angouisso despièi lou mes de mars. La doulourouso pountannado dóu proumier encafournamen que de trop durè, maquè li cor e marquè de tristun la tragico situacioun sanitàri viscudo. Uno situacioun mal-eisado que sèmpre s’esperlongo, que nous tafuro, qu’empacho tourna-mai la tengudo dis acamp previst à Fourco e la souciableta de la vido-vidanto d’èstre ço que devrié èstre.

Avèn sachu, nàutri, felibre, se sarra, parteja, s’ajuda, faire barrula de nouvello, avèn assaja de pas desnousa li liame que nous unisson, sarié qu’au travès de la revisto e dóu site Internet. Avèn tengu e tenèn riboun-ribagno l’empento mau-grat lis inmancàbli resoun que butavon e buton vuei encaro à la desseparacioun.

Car felibre, à l’ouro qu’aurien degu agué l’ur de s’acampa enfin à l’entour de la Coupo, nòsti pensado van vers lou mounde qu’an pati e que sèmpre patisson d’aquelo countagioun : li vitimo, li malaut, lou cors medicau e tóuti aquéli que sènso fali an permés e permeton la countùni de la vido. Plus entimamen, nòsti pensado anaran de-vers li felibre qu’an aganta lou marrit virus e que n’an endura li degai, i’afourtissèn nosto coumpassioun.
À fauto de Santo-Estello 2020, e aro dis acamp fourquen e de la Taulejado soulenno de la Coupo que se ié devié teni bono-di la bèn-voulènci de Moussu lou Maire Gile Dumas, espandissen lou discours de la Coupo pèr lou flus de l’Internet. Li felibre counèisson, Moussu lou Maire de Fourco, voste estacamen à nosto Causo e i valour dóu Felibrige, sabon lou pres-fa que coumplissès pèr la lengo e la culturo nostro. Aquelo escasènço nous aurié permés de vous pourta la Coupo, un ate que persounalamen me rejouïsssié tant sabe que n’avalourias lou pes e lou simbèu.
Gramaci Moussu lou Maire, gramaci à voste counsèu municipau, gramaci i felibre de Fourco e à l’Escolo d’Argènço qu’avien tout mes en obro pèr nous bèn aculi e nous pourgi tant preciouso ajudo.

Car Felibre,
Prounounciarai pas lou discours qu’aviéu previst pèr Mende, coumprendrés que prefere vuei touca à l’atualita empenchado pèr la criso. S’agis pas de n’en coumenta li differènt carage e tóuti li counsequènci, caucarian foro l’iero de noste Felibrige. Mai, vous sias de-segur avisa coume iéu, qu’à la sourtido dóu counfinamen dóu printèms, d’ùni sujèt mistralen fuguèron bouta sus lou taulié : la plaço, lou role di regioun ; lou retour vers li campagno, la reloucalisacioun, la decentralisacioun.
Tout-à-n-un cop, s’es trouva milo merite, d’avantage e de bèn-fa à la filousoufìo mistralenco, subran repareissié, cargado de sèn, la vièio revendicacioun dis annado setanto « viéure au païs ». Lis afiermacioun qu’avèn vist giscla d’eici d’eila, sènso que lou sachèsson vertadieramen sis autour, fan referènci à ço que toustèms reclamo lou Felibrige que sa dóutrino caup dins lis obro de Frederi Mistral e de si disciple.
Aro que coustatan, pèr touto meno de resoun, uno claro voulounta de fugi la vilo, tre 1880, Frederi Mistral, dins sa dicho « La despoupulacioun di campagno », prevenié :
« Ah ! Se sabien lou mau que se fai à la patrìo, en derrabant au pople, à l’ome de la terro, lou liame que l’estaco à sa vièio famiho, à si bòni coustumo, au païs ounte es na ! »
« La poupulacioun s’envai, la jouinesso davalo vers lou pourridié di vilo ».
Mistral voulié pas vèire la poupulacioun abandouna li campagno pèr s’istala dins li vilo, sabié qu’aquel eisode èro lou rebous di valour qu’espandissié. La realita de vuei provo qu’avié resoun. Lou mecanisme es à mand de s’enversa. Après agué nada dins l’aigo roso, l’abounde e l’inchaiènço, lou mounde s’aviso qu’en fin finalo eisisto un autre biais de viéure, bessai em’un pau mens d’eisanço e un pau mai d’estaqueto, mai, de quant, mai, san e siau.
I’a pièi la reloucalisacioun que fai ecò à l’esperit mistralen e à ço que n’en pensè en 1960 Carle Chabanis : « Se se pèrd la Terro, se pèrd lou Cèu, se gagno que de farfantello. Mistral refuso lou travai sènso amo, refus d’aquéu mounde de teinico ounte aleno plus l’esperit. ’Mé la perdo de l’amo, vèn lou manco de fisanço dins la vido e lou mesprés dóu travai. » e, « Mistral es contro l’abestimen que lou prougrès adus is ome, contro aquesto civilisacioun mai que mai mecanico que retrais à uno tiranìo, contro lou poudé fabulous di causo sènso amo ».

Claro referènci à nosto dóutrino, tambèn, quouro s’avison, nòsti catau, di bèn-fa de la regiounalisacioun.
Ramenten-nous quouro Frederi Mistral reguignavo en 1875 à Mount-Pelié : « D’ounte vèn aquéu descrid… Vèn-ti de l’óupressioun, toujour que mai creissènto, dóu cèntre parisen ? Vèn-ti de la manìo que l’on a dins aquest siècle de voulé tout aplana, e de voulé que tóuti marchon la memo causo, pènson la memo causo, parlon de la memo causo ? »
Pièi, en 1882 largavo :
« Devèn-ti pas nous garanti contro l’abus de l’unita, contro aquelo puissanço terriblo, demasiado, la centralisacioun, que nous vèn embasta, jusqu’au darrié vilage di Pirenèu e di Ceveno, noun soulamen si modo e soun unifourmita, mai encaro si foulié, sa trufarié, soun cativié, aquelo centralisacioun que se vòu mescla de tout ».
Venguè alor, cènt an plus tard, l’ouro de la decentralisacioun, lou Felibrige sèmpre atentiéu à soun amagestramen voutè à la Santo-Estello de Sant-Sever en 1981 lou vot que veici : « Le Conseil général du Félibrige prend acte des intentions manifestées par le Gouvernement de la République, en faveur d’une véritable régionalisation, chaque région devant retrouver son identité géographique, linguistique et historique à côté des nécessités économiques et sociales contingentes. Il se félicite de voir accueillies les idées que le Félibrige a mises en avant et défendues sans relâche depuis 1854. »
L’an d’après, lou menistre de la Decentralisacioun avié larga : « La décentralisation ne sera effective et vraisemblablement entrée dans les mœurs que quand elle sera à la fois une décentralisation culturelle et une décentralisation économique, c’est-à-dire quand les artistes n’auront plus besoin d’aller à Paris pour être consacrés sur le plan national ou international, et quand les chefs d’entreprises n’auront plus besoin de se rendre dans la capitale pour régler leur dossier : alors vraiment la France sera un pays décentralisé ».

Di paraulo is ate, torte es lou camin. Aura faugu espera encaro quasimen quaranto an, au mes de juliet darrié, pèr entèndre de paraulo similàri e mai que mai pèr aprendre, de la bouco dóu presidènt di regioun de Franço, l’A.R.F., que parlon pas soulamen, li presidènt de regioun, de decentralisacioun, mai tambèn de federalisme e de cop d’autounoumìo !
Encaro de paraulo me dirés. Segur ! Mai acò provo que i’a au mens uno refleissioun sus lou sujèt e subre que tout, que l’idèio dóu Mèstre viroulejo.
Es quasimen pas de crèire, ausi tau voucabulàri dins la bouco d’un ome pouliti francés en 2020 ! N’en fuguère lou proumié estabousi, pamens s’encapo à la belesso dins l’endrechiero de la paraulo mistralenco. Dins « L’estacamen au terraire », Mistral sènso retenènço emplego sièis cop lou mot independènci. Dins lou mot independènci, tau que l’emplego lou Mèstre, ié fau vèire justamen ço que demandon vuei li presidènt de regioun : l’independènci d’esperit, de pensado, de chausido e d’acioun.
Avèn meme entendu, de la bouco dóu porto-paraulo dóu gouvernamen à la sourtido dóu Counsèu di menistre dóu 7 de juliet passa, evouca uno « Reconstruction des territoires ».

Veici dounc car felibre, lis efèt percéupu long d’aquéli darrié mes. D’efèt que poudrien enfin respondre i grèuge espremi pèr Frederi Mistral quouro disié dins « li prejujat poupulàri » : « Dins li vilo mouvedisso, ounte mai que jamai l’esprit de nouvèuta meno e courroump lou pople, es quàsi un desounour de garda li coustumo, tradicioun, e parla de nòsti davancié ; de talo sorto que pertout, au tiatre, au palais, à l’escolo, à la glèiso, se fai à nosto lengo uno guerro incounsciènto, mai pamens journaliero, e à la fin mourtalo. » O encaro dins « La lengo dóu Miejour » : « S’aquéli que nous entèndon soun de gènt coume se dèu, de persouno d’esprit o simplamen de bràvi gènt, aprouvaran de cor noste galoi e franc parla ; s’au countràri es de nèsci, noste eisèmple i’aprendra à reveni au naturau. »

« Mistral douno responso à ço que l’ome cerco, à ço que, de-longo, lou secuto : a despassa li raro de sa patrìo, es de tóuti li patrìo », escriguè Andriéu Chamson . Avèn rèn enventa, countunian nautre de prouclama aquéli quatre verita dins lou drech ana de ço que lou Mèstre escrivié à Jùli Boissière : « Ma counvicioun, partejado deja pèr quàuquis ome de pensado, es que lou Felibrige porto en éu la soulucioun di gràndi questioun poulitico e soucialo que boulegon l’umanita. »

Mai, car felibre, garden-nous pamens, coume prevèn encaro Frederi Mistral, de nous entreva de poulitico pouliticiano. Basto de se ramenta aquéli vers dins « Li Noço de Ranquet » : « Dins la poulitico, – Turno despoutico, – i’a que de capoun – E de cop de poung ! ».
Just e just à rebous de la poulitico pouliticiano e de la poulitico de partit, ço que nous interèsso es la poulitico au sèns noble e plenié dóu terme, pièi qu’avèn qu’uno poulitico : la nostro, coume lou ramentavo voulountié lou regreta majourau Michèu Tintou. Aquelo poulitico caupudo dins l’obro e li dicho de Frederi Mistral, Mistral que de dela l’aparamen de la lengo e dóu signe de famiho, souvetavo establi pacientamen la pas dóu mounde sus la foundamento federativo, principalamen d’uno federacioun latino que, luen de voulé escafa li persounalita etnico aurié counserva touto l’autounoumìo que s’endevèn emé lis eisigènci dóu liame federau.

Emai lou federalisme siegue esta lou pantai en d’àutri tèms, li paraulo de Frederi Mistral, éli, sèmpre demoron noste gouvèr. Embuguen-nous encaro d’aquéli citacioun mistralenco que fan nosto forço, que baion enavans, qu’esplicon noste engajamen e que coumandon nosto counducho :
– Dins « La lengo dóu Miejour » : « E quand lou pople coumprendra lou sèn patriouti e la grandour dóu Felibrige… »
– Dins « l’Estacamen au terraire » : « coumprenès aro la prefoundeta, la forço de l’idèio felibrenco ».
– Dins « Lou Felibrige e l’empèri dóu soulèu » : « …que la Franço n’en tiro glòri, que la Franço n’en crèis que mai ».
– Dins « Li prejujat poupulàri » : « bravant li desden de la mouderno sufisènço », uno fraso sèmpre d’atualita
À la lus dóu message universau de Frederi Mistral, voulèn crèire qu’un jour enfin, lou Felibrige ispirara gouvèr e soucieta.

Vaqui car felibre, à l’image de l’atualita, ço que vuei vous vouliéu dire en adusènt la demoustranço que Mistral sèmpre endraio e fai lume. E, après aqueste paraulun, pèr bèn coumprendre noste Felibrige, lou fau saupre regarda, lou fau aprecia, lou fau remira e l’entre-teni coume un mounumen patrimouniau, mai tambèn coume lou flambèu de nosto Respelido e de nòstis esperanço.

Lou Felibrige, car felibre, douno lou bonur de counèisse e d’ama uno istòri e un eiretage, de viéure un presènt resouna e de, prouvesi d’ideau, de s’embandi de-vers l’aveni. Lou Felibrige baio d’ùni clau pèr lou bèn-èstre e lou siau de la soucieta. Lou Felibrige enrichis la vido.
La jouino generacioun de nòstis encountrado aura de s’embuga mai que mai de la filousoufìo mistralenco pèr pega à-n-aquelo auto realita semantico.

Diéu-gràci, tóuti li generacioun de felibre an sachu prevèire lis endeman, sèmpre an coungreia de voucacioun qu’integrèron lou drudige felibren, que l’an apara e servi.
Alor que se proufielo pau à cha pau l’acabado de moun capouleirat, poudès pas saupre la joio que me gagno de vèire se destria li voucacioun que faran lou Felibrige de deman.

Adounc, béurai à l’ardour e à l’engajamen.
Béurai au maire de Fourco, moussu Gile Dumas, qu’encarno aquéli valour.
Béurai à nosto rèino Adelino e soun enfant Gaëthan.
Béurai au baile dóu Felibrige nouvelàri, lou majourau Paulin Reynard.

Soulet, davans moun Mount-Ventùri, en pensado emé cadun d’entre vautre, béurai à vàutri tóuti, car felibre, qu’avès l’aveni dóu Felibrige entre vòsti man.

Dins l’espèro d’èstre l’an que vèn à Mende, reüni dins la coumunioun de la Coupo vous adrèisse, car felibre, moun plus freirenau salut.

Jaque Mouttet
Capoulié dóu Felibrige

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